Szafran à l’Orangerie, une expérience d’enfermement

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Sam Szafran, cet homme menacé dans son enfance par la persécution nazie,
puis par la misère…
a trouvé spirituellement et socialement son salut dans l’art et les fraternisations du Montparnasse d’après-guerre.

Peut-être aurait-il aimé la liberté ?
Elle était hors de portée.
Il choisit donc…
la discipline des enfermements consentis, infiniment décrits et finalement aimés…


– des ateliers,

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Rue du Champ-de-mars
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Rue de Crussol

– des escaliers,

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Escalier (repris en couverture de la revue La Délirante, automne 1972)
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– des plantes envahissantes,

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et, à mesure que la sécurité devenait envisageable,
la mutation de la serre en JARDIN…

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puis sa possible transformation en PARADIS
dès lors qu’il incluait la femme aimée…

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L’œuvre de Szafran pourrait-elle également nous inclure ?
Telle était ma question. Je répondis que non.
L’enfermement lui-même est inclusif.
Puissant comme la modernité…

Cet enfermement a dévoré Szafran, l’exposition qui lui est consacrée, jusqu’à l’Orangerie, nymphéas compris, et les statues du jardin des Tuileries.

On rêvait d’une visite chez Szafran.

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Il est sous verre (pastel oblige), en cave (au deuxième étage du sous-sol) et l’on n’écoute sa voix que dans les incommodes écouteurs de l’audioguide.

On rêvait de sa confrontation avec les Nymphéas de Monet.

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Ils sont gris et surchargés de visiteurs. Au lieu de couleurs et de paix, la foule. Pas de contemplation possible.

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L’expérience serait mortelle s’il n’était l’amusement d’une tâche de rouge portée par une petite fille que sa mère a rêvée « libre comme l’air » alors qu’elle la conduit après avoir fait taire sa péronnelle.

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Dehors, avant, après les contrôles, les présentations et les restitutions d’objets, la consternation devant des queues composites en provenance des quatre coins du monde, un kaléidoscope de langues et moins de regard pour ce qu’on prétend voir que pour le smartphone-à-selfies qui permettra de dire qu’on y était.

Cette foule connectée, dans le culte qu’elle rend aux lieux, aux monuments, aux artistes et aux œuvres, aux « originaux » médiatisés, se présente à elle-même comme étant de partout, d’un ailleurs universel dont elle ne se soucie guère et que, spirituellement, elle ravage.

Dès sa réouverture, ils « feront » Notre-Dame en regrettant pour l’image que l’incendie soit fini…

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En attendant, pour les accueillir, on a fait des prodiges d’architecture souterraine, de rationalisation des « mises-à-voir » et d’industrialisation de parcours réglés par la dialectique du dedans-dehors qui sert de paradigme au tourisme de masse.

D’une barrière à l’autre, les systèmes de concentration des visiteurs s’étendent désormais sur ce qui était autrefois un jardin de parade et d’agrément : les Tuileries.

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Enfermement inclusif, vous dis-je.
Comme les philendrons monsteras de Sam Szafran, il grimpe jusqu’aux statues ligotées qui, pourtant, se débattent dans les allées pour s’enfuir avec les feuilles d’automne.

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